À quoi ressemble une journée type pendant la guérison ?
Si vous n'êtes pas familier avec les concepts de la guérison "mind body", lire ces deux posts introductifs rendra les choses plus claires : Mon processus de guérison et La Théorie Polyvagale.
J'ai regardé énormément d'histoires de guérison, j'ai suivi trois programmes mind-body payants, et j'ai lu une montagne de livres. Pourtant, une question est restée sans réponse :
"Tout ça, c'est super en théorie... mais qu'est-ce que je suis censée faire de mes journées exactement ??"
J'ai longtemps espéré que quelqu'un me tende une feuille de route. "Faites ceci pendant X minutes, X fois par jour, et reposez-vous X heures par jour. Si tel symptôme apparaît, faites ceci. Et vous guérirez." Mais je n'ai rien trouvé de tel. Pas même quelqu'un pour décrire à quoi ressemblait vraiment son quotidien pendant la guérison.
Je me sentais complètement perdue, sans boussole.
On m'a répété encore et encore que les chemins de guérison sont uniques et qu'il n'y a pas de plan tout fait. Mais il m'a fallu le vivre pour le croire.
Je sais, pour l'instant, tout ça n'a pas l'air très utile. 😅 Alors je vais vous donner des repères concrets et vous dire à quoi ressemblait mon quotidien à chaque étape.
Les fondations d'une journée de guérison
J’ai longtemps eu du mal à "définir ma baseline" (ma capacité physique, cognitive et émotionnelle).
Qu’est-ce que je suis réellement capable de faire ?
Avec le temps, j’ai réalisé que mon corps le sait. Je n’ai qu’à l’écouter. La baseline correspond à tout ce qu'on se sent capable de faire avec 80–90% de confiance. En état sévère, c'est souvent très peu, mais c’est ok. L’idée est simplement d’avoir une estimation générale de ce qu'on peut faire sans appréhension.
On a tous des choses que l'on est obligés de faire.
Essayez de placer un temps d'apaisement avant et après une tâche obligatoire. Envisagez de déléguer ou de simplifier tout ce qui peut l'être.
Je sais que demander de l'aide est difficile, mais ça fait partie de la guérison. Parfois, la maladie ne nous laisse plus le choix. Votre corps a besoin de temps et d'espace pour guérir.
Après avoir testé différents outils pour réguler votre système nerveux (une super boîte à outils est disponible ici), vous avez probablement repéré quelques pratiques qui vous font du bien.
Utilisez-les quand vous en ressentez l'élan, pas comme un devoir à faire. Se sentir en sécurité et prendre du plaisir est plus important que la pratique en elle-même.
Le repos n'est pas "ne rien faire", c'est un signal de sécurité. Parfois, se reposer veut dire s'allonger sans stimulation, et d'autres fois, il peut s'agir d'une pratique de régulation douce.
Si des symptômes apparaissent dans la journée, ralentissez et accueillez-les avec calme et bienveillance. Plus de détails sur ce point : la gestion des périodes symptomatiques.
Je ne peux pas insister assez sur la fonction essentielle de la joie dans la guérison. Parsemez vos journées d'autant de "moments plaisir" que possible, selon votre capacité du moment. Même des tout petits.
Regarder les oiseaux à travers la fenêtre. Une conversation avec un proche qu'on aime. Aller marcher dans la nature. Regarder un bon film.
Dans les états sévères, je sais qu'il faut aller chercher la joie volontairement et que ce n'est pas facile. Mais je vous encourage vraiment à essayer.
La connexion humaine est une ressource mais peut aussi consommer de l'énergie. Être entouré de personnes positives et sécurisantes aide beaucoup, mais être auprès de personnes toxiques ou tendues nous épuise plus qu'on ne le croit. Prenez cela en compte.
Il y aura toujours des événements inattendus, agréables ou non. Même si on essaie de construire une "bulle de guérison" autour de soi, la vie continue. Essayez de ne pas anticiper le pire. Si quelque chose survient, faites vous confiance. Vous saurez y faire face.
Ces fondations sont là pour vous aider à repérer de quoi se compose une journée, pas pour devenir un nouveau cadre rigide. Votre corps vous guidera tout au long du chemin. L'objectif est simplement de répondre au mieux à ses besoins tout au long de la journée.
Écoutez-vous
Qu'est ce que je peux faire?
J'ai mis du temps à faire la distinction entre : "Eh, j'ai l'impression que je suis capable de faire ça aujourd'hui !" (la voix calme de la curiosité et de la confiance), et : "Je veux être capable de faire ça" ou "Je devrais pouvoir faire ça, depuis le temps..." (la voix de la pression et du désespoir).
Si vous ne savez pas quoi faire, posez-vous cette question :
"Parmi les activités que je me sens capable de faire, qu'est ce que j'ai envie de faire là maintenant ?"
L'ordre de la question est important. Se concentrer sur ce qu'on n'est pas encore capable de faire nous enferme dans la frustration. Se concentrer sur ce qu'on peut faire, même si ce sont de toutes petites choses, nous ramène à la sécurité et à un sentiment d'autonomie.
Les journées ne seront jamais exactement les mêmes
Il y a des jours où je peux marcher 2 000 pas.
Le lendemain, je ne sors pas, mais je fais le ménage.
Quelques jours plus tard, je peux marcher 2 500 pas.
Certains jours je peux conduire !
Et d’autres jours, tout ce que je peux faire, c’est me reposer ou regarder Netflix sur le canapé.
Cela ne veut pas dire que la guérison n’avance pas. Mais simplement qu'elle n’est pas linéaire. C’est pour cette raison que je n'ai pas de planning complètement figé, minute par minute.
Faites confiance à votre instinct
Si quelqu’un — un thérapeute, un médecin, un coach, ou même un proche — vous propose un plan de guérison rigide, prenez-le avec un peu de recul. Beaucoup de personnes suivent encore d'anciens modèles et ne prennent pas en compte la nature non-linéaire de ces processus de guérison.
Bien sûr, il ne s’agit pas d’ignorer les recommandations médicales. Mais si quelque chose vous fait vraiment tiquer, faites-vous confiance. Vous êtes la personne qui connaît le mieux votre corps.
Ne vous laissez pas piéger par le "travail" de guérison
Pendant longtemps, j’ai cru qu’il me fallait un plan strict et détaillé pour absolument tout dans ma vie. Puis j’ai réalisé que cela était dicté par beaucoup d'anxiété et un besoin de contrôle. Pour guérir, j’ai dû accepter de faire l’inverse : relâcher la pression et laisser plus de place à l’improvisation… car mon cerveau en avait désespérément besoin.
Un plan trop rigide peut vite devenir une prison.
Ne vous laissez pas enfermer dans des pensées qui maintiennent votre système nerveux sous tension :
"Je devrais..."
"Il faut que..."
"C'est comme ça, et pas autrement"
"Si je ne suis pas ce programme à la lettre, je ne guérirai pas"
Vous n’avez pas besoin de "travailler" à votre guérison 24h/24. Et la guérison ne demande pas de perfection. En réalité, ce qui nous aide le plus à guérir ressemble beaucoup moins à du "travail" qu'on ne l'imagine.
Pour finir, j’aimerais vous dire à quoi mes journées ont ressemblé concrètement ces deux dernières années. Ce n'est absolument pas un modèle à copier, mais j'espère que cela sera rassurant et que cela pourra vous donner quelques repères.
À quoi ont ressemblé mes journées
🪫 Les journées en état "très sévères"
- Matinée
- Réveil naturel tôt (6h du matin, impossible de me rendormir).
- Petit déjeuner au lit (nourriture dans une boîte à côté du lit).
- Aller aux toilettes et utiliser une lingette pour nettoyer une partie de mon corps en étant assise, si je m'en sentais capable.
- Douche avec l'aide de mon compagnon (une fois tous les 1 ou 2 mois).
- Journée
- Repos au lit sans stimulation (90-95% de la journée).
- Déjeuner au lit.
- Me tourner dans le lit autant que possible pour faire circuler le sang.
- Aller aux toilettes (environ 5 fois par jour).
- Respiration lente et profonde (10 minutes 3 fois par jour, si possible).
- Quelques minutes à regarder des vidéos drôles, les bons jours.
- Travailler avec mes pensées: me répéter des messages de sécurité, me convaincre que je pouvais guérir, et stopper les spirales d'anxiété le plus vite possible.
- Soirée
- Diner au lit (tôt, 18h ou 19h).
- Me brosser les dents assise.
- Dormir directement après.
⚠️ Les journées en état "sévères"
(Ce qui change par rapport à l'état très sévère)
- Matinée
- Réveil et faire le lit, pour passer la journée "sur" le lit, et plus "dans" le lit (important pour signaler la différence jour/nuit au cerveau).
- Douche assise (une fois par semaine).
- Journée
- Exercices de respiration ou méditation guidée (1-2 fois par jour).
- Lire, regarder des vidéos, parler à mes proches (pour 1 ou 2 heures sur l'ensemble de la journée).
- Aller à la cuisine (20 pas, 1-2 fois par jour), pour prendre un snack, ou réchauffer un plat au micro-ondes les bons jours.
- Le reste du temps... repos sans stimulation.
- J'ai continué le travail sur mon esprit, pour attraper les schémas de pensées délétères et éviter les spirales d'anxiété.
🌱 Les journées en état "modéré / léger"
- Matinée
- Réveil assez lent (je dors mieux, et plus longtemps).
- Aller dans le salon pour passer la journée.
- Passer du temps sur l'ordinateur, travailler sur le blog, faire des tâches administratives, discuter avec des gens + pauses courtes.
- Une visio consultation avec le psychologue - TCC avec un psy qui connaît le Covid long et l'EM/SFC (une fois par semaine).
- Journée
- Mini check-ins tout au long de la journée : 30 secondes, une grande inspiration, main sur le cœur, yeux fermés. Juste sentir mon corps.
- Cuisiner un repas simple pour le déjeuner et faire des corvées légères.
- Une sieste ou une méditation guidée si j'en ressens le besoin.
- Une activité physique, idéalement à l'extérieur, dans l'après-midi (marcher, faire du yoga, conduire, faire du vélo électrique, aller au magasin à côté...).
- Soirée
- Dîner avec mon compagnon (cuisiner ensemble, regarder un film, discuter...).
- Douche debout (tous les jours !).
- Lecture avant de dormir.
Souvenez-vous : Ce n'est pas grave si aujourd'hui...
... vous avez plus de symptômes que d’habitude.
... vous vous sentez découragé.
... vous faites un peu plus d'activité de façon imprévue.
... vous n'arrivez pas à reproduire la même activité qu'hier.
... vous avez besoin d'une pause sur les pratiques de guérison.
... vous n'avez aucune idée de ce qu'il faut faire.
Le processus n'a pas besoin d'être parfait. Il est fait d'essais et d'erreurs.
Conclusion
Je sais qu'on recherche tous un plan clair. Mais le plan se construit de lui-même, au fur et à mesure. La seule chose qui compte, c'est la prochaine micro-étape.
Votre corps connaît le chemin. Écoutez-le. Avancez à petits pas, une petite décision à la fois. Si vous restez à l'écoute, vous ne pouvez pas vous tromper. Vous êtes déjà sur la bonne voie.
Une dernière chose apprise en chemin : à chaque fois que je me suis dit que je n'en faisais pas assez pour guérir... c'était mes schémas qui parlaient. Trop d'exigence, trop de perfectionnisme. Ce dont j'avais besoin dans ces moments là était l'exact opposé : ralentir, et faire confiance au processus.