Des outils pour chaque niveau de sévérité
Note: Ce post sera plus facile à comprendre si vous avez d’abord lu l’article sur les États du système nerveux.
Chaque niveau de sévérité demande sa propre approche. Selon votre capacité actuelle, certaines pratiques ne sont peut-être pas accessibles, et ce n'est pas grave. Il y a toujours quelque chose à faire pour soutenir son système nerveux.
Dans ce post, je partage ce qui m’a aidée à chaque étape, avec les capacités que j’avais à ce moment-là.
Avant de commencer, je veux que vous gardiez ceci en tête : Vous n’avez pas besoin de savoir à quoi va ressembler tout le chemin dès le départ. Faites confiance à votre corps. Les prochaines étapes se présenteront d’elles-mêmes, quand votre système sera prêt.
Très sévère
En état très sévère, retrouver du confort est le seul objectif.
À quoi ça ressemblait pour moi
- Alitée, allongée à plat 23h30 par jour, juste possible d'aller aux toilettes.
- Incapable de regarder ou d’écouter quoi que ce soit plus d’une minute.
- Symptômes intenses permanents, repos sans stimulation quasi permanent.
- Système nerveux bloqué en 🪫 Immobilisation / shutdown profond.
Ce qui m'a aidée
Pensées et émotions
- Vivre une seconde à la fois. La seule chose qui compte, c’est la prochaine respiration.
- Lâcher prise. Ça ne veut pas dire abandonner, mais accueillir ce qui est là, sans jugement.
- Croire sincèrement que ce n’était pas pour toujours.
- M'autoriser à ressentir la tristesse, le chagrin ou la peur pendant quelques instants, sans m’y perdre trop longtemps.
Exercices
- Respirer en souriant (même un faux sourire envoie un signal de sécurité).
- Compter mes respirations (inspirer, 1... expirer, 2...).
- Me concentrer sur des sensations très précises dans mon corps, qui étaient neutres ou agréables (le bout de mon nez, mes orteils, mes fesses...).
- Une mini-action pour me sentir 1% plus confortable ou sécurisée : rafraîchir mon corps avec une lingette, manger un petit snack, discuter un instant avec mon compagnon.
Conseils pratiques
- Boissons ou barres protéinées pour les jours où je n'arrivais pas à manger.
- Casque à réduction de bruit et masque pour les yeux, pour reposer les sens.
- Lingettes humides pour le corps.
- Un ventilateur avec une télécommande.
- Couper mes cheveux très courts pour faciliter le lavage.
- Des objets réconfortants (pour moi, des peluches, une lanterne pour les nuits difficiles, et le serre-tête grenouille 💫).
Severe
En état sévère, il faut essayer de renforcer doucement le sentiment de sécurité, pour que le système nerveux puisse sortir progressivement de l’immobilisation. L'objectif n’est pas d’en faire plus, mais plutôt de stabiliser les choses en limitant les coûts en énergie.
À quoi ça ressemblait pour moi
- Principalement alitée, avec des petits moments dans le salon ou le jardin.
- Capable d'utiliser mon téléphone ou de parler sur des courtes périodes.
- Capable de me doucher une fois par semaine.
- Symptômes permanents, beaucoup de hauts et de bas, repos complet toujours très présent.
- Système nerveux principalement en 🪫 Immobilisation, avec des passages occasionnels en ⚠️ Combat-Fuite.
Ce qui m'a aidée
Pensées et émotions
- Dialogue interne rassurant sur les symptômes : ce sont juste des sensations, pas des menaces.
- Lâcher prise sur le mode "je dois trouver ce qui cloche"
- Remarquer et stopper mes ruminations et pensées anxieuses, rediriger gentiment mon attention.
- Accueillir mes émotions et les ressentir dans mon corps.
- Ne jamais anticiper la catastrophe en faisant une activité. Tenter des choses lorsqu'on se sent en sécurité et régulé.
Exercices
- Méditations, surtout du tracking somatique, pour les sensations corporelles et les émotions.
- Mouvement doux pour favoriser la circulation sanguine, comme des rotations des poignets ou des chevilles.
- Toucher apaisant, comme le massage des mains, des bras ou des cuisses.
- Stimulation légère et joyeuse : pour moi, c'était regarder des vidéos (comédie, vidéos de rénovation, vidéos de chats), écouter de la musique douce et chanter. Plus tard, j'ai pu faire des Lego, quelques minutes à la fois.
Conseils pratiques
- Faciliter les douches
- S'assoir sur le sol ou sur un tabouret de douche.
- Utiliser une fleur de douche pour étaler le savon sans effort, et un savon qui se rince rapidement.
- Avoir un peignoir pour se rallonger rapidement, sans avoir à se sécher ou s'habiller.
- Avoir un évier gonflable pour qu'un proche puisse vous laver les cheveux de temps en temps, en restant allongé.
- Utiliser le mode dictée du téléphone pour écrire des messages sans regarder l'écran, et rester en contact avec ses proches.
- Ajouter des plantes dans la chambre pour être connecté à la nature sans avoir à aller dehors.

Modéré à léger
En état modéré à léger, on peut élargir doucement l’activité, tout en gardant le système nerveux régulé et ancré dans la sécurité. Les symptômes sont toujours présents, mais ils sont moins menaçants. Ils s’atténuent progressivement, au fur et à mesure que la vie reprend sa place.
À quoi ça ressemblait pour moi
- Bloquée à la maison au départ, puis mon "territoire" s'est progressivement élargi vers le jardin, puis vers l'extérieur.
- Symptômes moins intenses, mais toujours présents en fond. Il y a toujours des hauts et des bas, mais moins intenses.
- Plus de sérénité et de confiance en l'avenir.
- Système nerveux qui oscille entre 🌱 Sécurité et ⚠️ Combat-Fuite. Les moments en 🪫 Immobilisation sont beaucoup plus rares.
Ce qui m'a aidée
Pensées et émotions
- Faire confiance à l’intuition de mon corps pour élargir l’activité. J’ai arrêté d’écouter la voix de la frustration qui disait « je devrais être capable de faire ça maintenant », et j’ai commencé à écouter la voix de la confiance et de la curiosité : « aujourd’hui, je sens que je peux faire ça ! ». Toutes mes expansions réussies ont commencé comme ça.
- Poser des limites claires avec mes proches sur mes besoins. Ces discussions ne sont jamais faciles, mais elles créent des bases plus saines pour les relations.
- Travailler sur mes anciens schémas de survie, comme les exigences trop élevées, le perfectionnisme et l’auto-critique.
- Reprendre la thérapie, uniquement après m'être bien stabilisée. La TCC, l’ACT ou l’EMDR peuvent aider, notamment pour gérer le traumatisme de la maladie elle-même.
Exercices
- Mouvements doux :
- Marcher dehors (en allant très lentement)
- Un peu de yoga doux ou d’étirements sur le lit
- Un peu plus tard, du vélo électrique
- Me reconnecter aux autres, même si c'était surtout sur Internet, a été très réparateur.
- Ne jamais brusquer les choses, explorer en sécurité. Si je ne me sens pas en confiance pour une activité (et que j'ai le choix), je ne le fais pas. Mais je ne me sens jamais 100% en confiance non plus… Alors j’ai décidé ceci : si je me sens au moins 80% en confiance et dans un état régulé, alors j'essaie !
Conseils pratiques
- Trouver des repas simples que je pouvais préparer moi-même, pour retrouver un peu d’autonomie et de confiance (les surgelés m’ont beaucoup aidée !)
- Ouvrir les fenêtres chaque jour pour respirer un air plus frais.
- Changer quelques éléments dans la chambre (surtout quand on a été alité longtemps) : redécorer, déplacer les meubles, changer la literie… C’est une façon simple d’envoyer au système nerveux le message que cette période difficile est maintenant derrière vous.

Trouver de la joie
À tous les stades de sévérité, trouver de la joie était ma priorité. Au début avec de toutes petites choses, puis en me reconnectant petit à petit à mes passions. La joie est le meilleur médicament naturel du système nerveux, bien plus que n’importe quelle "pratique de guérison" que l’on essaie de s’imposer.
Le tracking ou suivi
Aucun type de "tracking" ne m'a été utile, à aucun stade.
Par "tracking", j’entends : surveiller la fréquence cardiaque, la variabilité (VFC), la tension artérielle, le nombre de pas, le temps passé sur une activité, ou utiliser tout appareil qui fournit ce genre de données. Pour moi, cela ne faisait qu’alimenter la peur.
Si le tracking vous aide, bien sûr, gardez-le ! Mais rappelez-vous que cela peut facilement basculer vers l’hyper-vigilance et alimenter l'état d'alerte.
Les périodes d'ajustement
Les périodes d'ajustement peuvent nous ramener à un niveau de capacité antérieur et donner l’impression d'un retour en état sévère. Mais il est essentiel de garder en tête que c'est temporaire.
Pendant ces moments-là, revenez à ce que vous a aidé auparavant, avec compassion : des pratiques douces si possible, du lâcher-prise, et faire confiance au processus.
En savoir plus sur les périodes d'ajustement ici
Conclusion
J’ai passé environ un an dans un état sévère et alitée, et quelques mois dans un état très sévère. Soyons honnêtes, ces mois-là étaient de la survie, et ils ont été extrêmement difficiles. Si vous êtes dans cette phase, accrochez-vous. Ça ne durera pas pour toujours.
Si une pratique est trop difficile ou ne semble pas fonctionner pour l'instant, ce n'est pas grave. Elle deviendra peut-être utile plus tard (ou pas !).
Chaque étape de la guérison peut demander une approche un peu différente, mais il n'y a pas besoin de tout comprendre ou de tout savoir dès le départ. L'étape suivante devient claire au moment où votre système est prêt à avancer. Vous êtes exactement là où vous devez être. Faites-vous confiance, vous avez tout ce qu'il faut en vous pour y arriver.